lundi 19 novembre 2018

"C'est l'Amérique !", à l'asiatique.


Indubitablement touchés par l'Inde (mais néanmoins rassasiés), notre nostalgie des plus beaux moments qui nous y ont été offerts s'estompe devant l'appétit des pays d'Asie où tout redevient facile. Plus clair, plus simple, plus léger, plus propre, plus silencieux, moins peuplé... Retour à la normale.
Nous redevenons des passants parmi d'autres sur de drôles de vélo. Nous avançons sans garder les yeux cloués au sol dans l'expectative d'un piège, et regardons les passants sans la crainte d'un flot de questions...

Le 25 octobre 2018

Nous attendons que la marée remonte pour libérer notre bateau indonésien qui, ayant touché le fond vaseux du fleuve, a chaviré à l'embouchure. Après cet instant de stupeur, nous traversons sans encombres de nouveau le détroit de Malacca pour revenir en Malaisie où nous atterrissions un mois plus tôt.

Kuala Lumpur. Un enchevêtrement de voies rapides à 2 x 5 voies, de ponts et d'embranchements qui perdent le premier venu. Comme des fourmis avançant sur un tas de ficelles, nous filons sur les bretelles d'autoroute en espérant qu'elle n'aboutissent pas dans un sac de nœud.
Pour la première fois, je pense que le GPS du téléphone portable est indispensable pour rallier une telle capitale.
Conçue à l'image de Los Angeles qu'un ministre du gouvernement malais dans les années 60 avait en estime (en témoigne l'analogie du drapeau de Malaisie avec celui des États-Unis), Kuala Lumpur est une mégalopole faite pour l'automobile.
Les autoroutes sont les artères principales de la capitale qui ondulent au grès des collines et allongent les distances tant que possible pour étirer et diluer le trafic routier.
Des voies secondaires irriguent les espaces intérieurs, constitués d'un savant mélange de méga-centres commerciaux et de ghettos de riches sous surveillance des népalais.
Deuxième ville la plus riche d'Asie du sud-est après Singapour, la capitale malaise nous propulse sur une autre planète...

Nous montons vers les plateaux du centre de la Malaisie.
Insectes, serpents, singes, varans... La forêt tropicale tapisse les montagnes en suivant ses reliefs insolites : plaines, falaises et pains de sucre au milieu desquels s'écoulent rivières et rizières.
Des fruits et légumes à profusion sur les étals des marchands et des encas à tout bout de champ, l'Asie gustative se pavane sous nos yeux au plaisir de nos papilles. L'asiatique mange peu mais tout le temps. Ce zèle alimentaire est le premier pourvoyeur d'argent et d'emplois localement, cela ne fait aucun doute.

Les hauts-plateaux malais mettent fin aux étendues forestières et accueillent désormais des plantations de thé, de fraises, de durian et de cacao...
Des centaines de serres serrées comme des sardines semblent se caramboler contre les rochers dans les pentes abruptes. Des milliers de tonnes de production sont acheminées à travers le pays, mais laissent l'honneur aux importations de Chine et d'Australie dans les supérettes des quartiers riches de la capitale.
Les communautés chinoises de Malaisie, largement présentes dans cet oasis d'altitude, nous renvoient à notre passage en Chine. Nous découvrons ce peuple sans la pression du gouvernement chinois, et nous nous retrouvons assis à leurs tablées de fumeurs sous les lampions rouges en devanture ou devant un canard laqué à la pékinoise...

La Malaisie est un curieux mélange culturel qui en fait une savoureuse richesse. Nous reconnaissons ainsi les profils chinois et tamouls (indiens originaires du Tamil Nadu) au milieu des belles malaisiennes aux pommettes rondes.
La République islamique accorde une grande tolérance religieuse, et les chinoises en mini-jupe côtoient ainsi les musulmanes voilées au jean moulant dans les supermarchés, pendant que le tamoul accroche l'affiche officielle rappelant l'interdiction de vendre de l'alcool et du porc aux musulmans...

Ile de Penang.
Nous n'avons pas d'autre choix que de sortir le pousse pour arrêter une camionnette devant l'un des plus grands ponts au monde sur lequel les deux roues sont interdits. 24 km suspendus au-dessus du détroit pour rallier la péninsule malaise à l'île de Penang.
L'attente de l'arrivée de ma nouvelle carte bancaire nous permet de rester chez Adrian et de l'aider à entretenir sa guesthouse, de jouir de la vie locale avec légèreté et simplicité, préservée du tourisme et du modernisme.
Une semaine d'arrêt. Arrêt sur image. Nous connaissions la fin de l'histoire. Cette fois-ci il le faut : on tourne la page...